La journée avait été difficile, très difficile. Notre meilleur indic s’était fait allumer, la bande à Hugo continuait à écumer la région, le Paulo était introuvable, le Pierrot nous donnait toujours du fil à retordre et, cerise sur le gâteau, le Doumé, que nous avions pris en filature, nous avait glissé entre les doigts. Le chef n’avait pas aimé du tout, il était entré dans une colère si noire que les murs de l’Evêché en tremblent encore.
- J’en ai vu des cons dans ma vie, des incapables aussi, des bons à rien certainement mais des trous du cul de votre espèce c’est inimaginable. Ce service pue. Je vais mettre un coup de karcher à toute cette merde.
Il ne faisait pas semblant l’ancien, il était vert de rage. Les têtes allaient certainement commencer à tomber. Je savais que la mienne ne resterait pas longtemps sur mes épaules. J’avais grandement participé au « succès » de l’équipe. Depuis le coup des corses, je n’étais plus en odeur de sainteté dans la grande maison et il fallait absolument que je sauve mes couilles, si je ne voulais pas me les faire bouffer. Et c’est là que me vint une idée de génie.
Comme tous les hommes, le chef avait une faiblesse, et de taille : la table ! Et surtout les pieds et paquets à la marseillaise ! Il adorait ça. Aussitôt, je pris mon téléphone pour appeler ma belle mère.
- Huguette, il me faut absolument des pieds et paquets pour demain. Ca urge !
- Mais mon petit Michel, je ne suis pas sur Marseille en ce moment alors je vais faire une chose, je vais te donner « ma » recette et tu te débouilles.
Décidément, rien n’allait comme je voulais et j’étais plutôt contrarié de son absence. Faut dire que les pieds et paquets n’étaient pas une mince affaire, mais elle m’avait très vite rassuré.
- C’est très simple à faire, c’est un plat long à préparer mais qui ne demande pas à être un chef de cuisine non plus. Il ne faut pas le compliquer en y rajoutant des ingrédients qui me semblent inutiles. Je ne mets jamais de lardon. Il y en a qui le font, moi pas, je trouve que ça les rend acides.
Je n’avais pas le choix.
- Allez, note pitchoun !
Il te faudra pour 4 personnes :
- 3 tripes de mouton,
- 4 pieds de mouton,
- de la fraise de veau
- 3 gousses d’ail,
- 2 oignons,
- une belle botte de persil,
- sel, poivre,
- de la noix de muscade,
- 1 boite de tomates au jus,
- une bouteille de vin blanc,
- et un verre de cognac.
Tout d’abord tu laves tes tripes de mouton puis tu les coupes en carrés de 6cm de coté en faisant une petite incision à l’un des coins. Plus les paquets sont petits plus ils sont gouteux. Mais c’est plus long. L’idéal c’est six par personnes. Tu n’oublies pas de laver la fraise aussi.
Une fois tous ces petits carrés disposés devant toi tu prépares un mélange ail persil que tu passes au mixeur. Il faut que ce soit haché très fin. Tu sales et tu poivres.
Après tu enfermes bien le tout en refermant les petits carrés et en faisant passer la moitié par la petite incision.
Tu t’occupes ensuite des pieds de moutons, et il ne faut pas oublier de les blanchir.
La préparation est terminée. Il faut passer à la cuisson. Et là il te faut une marmite en terre cuite. C’est le secret des pieds et paquets.
Tu mets un fond d’huile d’olive, tes oignons coupés fins que tu auras fait revenir,
Au fond de cette marmite tu disposes les paquets d’abord. Et là tu mets de la fraisette. C’est comme ça que ma grand-mère l’appelait, en fait la fraisette c’est de la fraise de veau, une membrane qui entoure l'intestin grêle du veau, que tu auras coupé en carrés de deux centimètres. Ensuite tu mets les pieds. Puis, tu vides ta bouteille de vin blanc. Et n’oublie pas le verre de cognac et la noix de muscade que tu râpes. A partir de ce moment là tu laisses faire. Tu couvres, tu mets à cuire à feu très très doux, de préférence sur une plaque électrique pendant 10 à 12 heures.
Avant de passer à table tu fais encore une fois réchauffer à feu doux, tu sais que les pieds et paquets plus c’est réchauffé meilleur c’est ; et tu sers avec des pommes de terre bouillies.
Allez zou, bon appétit mon petit et régale-toi bien !
C’est vrai que ça n’a pas été si
compliqué à faire, un peu long à préparer certes, mais le résultat est
exceptionnel. Sur le coup j’ai été fier de moi. C’est comme ça que je me suis
mis à la cuisine et aux pieds et paquets. Et c’est comme surtout ça que j’ai
continué à bosser à la Crim. Ca ne tient vraiment pas à grand-chose une
carrière de flic, juste à quelques conseils culinaires de sa belle mère.