Bisbigliu en Corse autour des textes d'un FLNC par Ugo Pandolfi
06 juin 2013
Au départ, il y a un ministre de l'Intérieur en visite dans l'île et une communication clandestine de six pages, signée FLNC, qui tombe au deuxième jour du séjour de Manuel Valls.
A l'arrivée: des corrections de l' information, surréalistes, transmises à la vitesse des réseaux sociaux.
#Corse Le communiqué menaçant l'Etat publié ce jour est in fine authentifié en soirée comme signé du #FLNC du 22 octobre par la radio RCFM
— France 3 Corse (@FTViaStella) 4 juin 2013
Aussi attentif soit-il aux complexités de l'actualité insulaire, le lecteur aura du mal à suivre, jusqu'à ni comprendre rien.
Le traitement médiatique de l'affaire ne l'aidera pas. Attribué d'abord au FLNC du 9 juillet, le dernier communiqué des clandestins qui menaçaient ce mardi 4 juin de reprendre les armes, a finalement été authentifié comme émanant du FLNC dit du 22 octobre. Pas facile de s'y retrouver dans le maquis des clandestins insulaires souligne, pour sa part, le 4 juin un journaliste corse généralement bien informé, sans préciser pour autant que la confusion doit plus aux médias qu'aux clandestins.
Avec 24 heures de retard et pas trés confraternelle, une dépêche de l'Agence France Presse du 5 juin n'aide guère plus le lecteur à sortir du maquis: Le communiqué du Front de libération nationale de la Corse (FLNC), qui s'est déclaré mardi prêt à reprendre les armes, a été authentifié comme émanant du mouvement dit du "22 octobre", un groupe clandestin armé actif dans les années 2000, indiquent mercredi les médias insulaires. Le texte, au départ attribué à une autre branche du FLNC créée lors d'une scission en juillet 2012, provient finalement du FLNC dit du "22 octobre", qui avait été instauré en 2002, précisent les médias locaux, dont la radio France Bleu RCFM à qui le message de six pages avait été adressé mardi tandis que le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, effectuait une visite dans l'île.
En langue Nabilla, la traduction risque d'affaiblir la crédibilité de la presse: "Non, mais allô quoi ! T'es journaliste, tu te mélanges les codes d'authentification du FLNC. Allô !"
Tapage, confusion, discorde. Trois mots peuvent traduire le mot bisbigliu qui peut s'écrire en langue corse de trois manières différentes.
Jamais nous n'avons connu un tel chaos. Telle est la deuxième phrase contenue dans la dernière communication clandestine corse répertoriée à ce jour.
Aux dernières nouvelles, dans le maquis de la clandestinité corse, il y a trois FLNC qui n'apprécient guère qu'on les confonde.
Trois#FLNC dans le maquis #corsebit.ly/13kPHbe
— France 3 Corse (@FTViaStella) 5 juin 2013
Sans oser conseiller à mes lecteurs d'adhérer sans méfiance à l'Association Internationale d'Analyses des Menaces Textuelles fondée par le linguiste Antoine Desanti dans les années 80, je ne peux m'empêcher, actualité oblige, de citer le passage d'une fiction qui ment vrai. Un premier niveau de comparaison avec d’autres corpus semblait indiquer que le texte que Desanti était en train d’étudier n’appartenait pas à l’ensemble des corpus relevant de la même signature politique. En clair cela pouvait vouloir dire que ce message clandestin était du genre Canada Dry. Il avait la couleur, le goût, la forme d’un classique du genre, mais ce n’était pas un classique du genre. Une piste comme une autre. Une piste fragile, indécidable tant que le système n’avait pas soumis les corpus aux savants calculs de complexes algorithmes de reconnaissance. Les signatures politiques affichées ne voulaient rien dire. Elles n’existaient pas pour Desanti. Elles n’avaient pas plus de valeur que les authentifications de la source que les journalistes avaient l’habitude de médiatiser. Seules les signatures lexicales comptaient.
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