Norvège: un entretien avec le chercheur André Grjebine dans Marianne 2
30 juillet 2011
Dans La société du ressentiment *, vous expliquez que dans une société où l’on ne peut pas exprimer son malaise dans le cadre du système, on l’exprime à l’extérieur, par exemple dans des partis populistes mais cela peut aller plus loin. Est-ce que c’est un thème que l’on rencontre dans la littérature ?
André Grjebine: Les romans policiers scandinaves sont très intéressants à ce sujet, ils décrivent des sociétés qui recèlent une violence dont le moins qu’on puisse dire, c'est qu’elle n’apparait pas à première vue. Un auteur suédois de romans policiers, Henning Mankell, a particulièrement bien décrit ce phénomène de l'individu isolé, qui a toutes les apparences de l'honorabilité, du bon citoyen, mais qui en réalité ressasse sa haine et qui finit par exploser. L’explosion est d'autant plus violente qu’elle survient dans un contexte où les chocs sont en général amortis par le consensus. Les scénarios décrits par les auteurs scandinaves de roman policier paraissaient souvent excessifs, noircissant à plaisir la société dans laquelle ils vivaient. Ils apparaissent aujourd’hui prémonitoires et en-dessous de la réalité.
* La société du ressentiment, l'Europe et la montée du communautarisme musulman - Le Débat n°164 - Mars/avril 2011
Source:Oslo: la violence refoulée des sociétés scandinaves, par Régis Soubrouillard.