Avez-vous acheté le dernier Ellroy ? par Denis Blémont-Cerli
26 janvier 2010
Ce qu'il y a de jouissif dans les chroniques de Denis Blémont-Cerli, c'est qu'il veut toujours mettre son grain de sel dans la rubrique « fout la merde » et qu'il ne craint jamais d'égratigner son copain webmestre. En attendant d'écrire le Corsican Tabloïd qui cassera la baraque, Denis s'en prend cette fois à James Ellroy. C'est son avis et il le partage...
Le
« Underworld USA » de James Ellroy est numéro un des ventes en France. Voilà
c’était prévu et c’est arrivé aussi fatalement que le diamètre d'un
cercle est deux fois plus long que son rayon. En vérité ce qui aurait été
parfaitement stupéfiant c’est qu’il ne le soit pas ! Vous avez
vu le bastringue autour de ce livre ! À croire que les autres polars sont
des cochonneries tout juste bonnes à servir de papier-cu.
Même notre bon webmaster a succombé à
l’hystérie collective en publiant sur Corsicapolar
une vidéo de l’auteur.
Bon sang, on ne pouvait pas ouvrir la télé ou un
journal sans voir la bobine du type, sans oublier des extraits de ci et de là
publiés dans les hebdos. Je ne pourrais pas vous dire si son livre est si bon
qu’il justifie qu’on monopolise l’appareil médiatique au
profil d’un seul parce que je ne l’achèterai pas. Ce n’est
pas que je suis regardant à 24€50 mais franchement je trouve qu’on
nous prend de plus en plus pour des tiroirs-caisses décérébrés. J’ai
cherché partout, journaux, télés, sites web, radios
le début d’une rognure d’un soupçon de critique négative :
rien ! Partout des louanges consensuelles si apologétiques qu’elles
renvoyaient à la notion de dogme religieux. Personne pour déplorer le style
« coupé à la serpette/jamais entendu parler de complément d’objet
direct ou pas », même si on ne peut demander à un auteur de polar
d’avoir l’expressivité de Proust. Extraits même pas choisis avec
intention néfaste : « Ils étaient
tous dans le bar. Ils étaient tous armés. Ils étaient tous bourrés… [...]
Ils laissèrent tomber les cartons. Ils visèrent et firent feu. Ils vidèrent
leurs armes… »
Je
le sais, il est interdit de s’en prendre à Dieu tout puissant, même dans
l’écriture on risque l’excommunication ou l’inquisition des Torquemadas de l’édition alors je change vite de
sujet.
Et
l’Iphone ? Vous l’avez acheté
l’Iphone ? Non dites-vous ! Alors si vous
n’avez d’Iphone vous êtes le dernier des
abrutis qui respire sur cette planète, on devrait vous fusiller sur-le-champ
sans passer en Conseil de guerre. Vous la sentez la honte ? Le rouge au
front ? Oui c’est humiliant je sais, je suis comme vous, j’ai
résisté et je me demande jusqu’à quand. Il me semble que je suis le
dernier à ne pas idolâtrer Steve Jobs, le gourou des pommes alors que ce serait
plutôt celui d’un autre fruit qui lui ressemble mais en plus allongé. Si
à cela vous rajoutez que vous n’avez pas participé comme moi à l’aliénation
pour benêts du débat sur l’identité nationale on va penser de vous que
vous êtes domicilié sur Véga dans la constellation de la Lyre ou bien que vous
êtes proche de l’état fossile d’un coelacanthe.
Mais
j’y pense, pour simplifier le tintouin ambiant, il serait peut-être utile
d’imposer par la loi les trucs que l’on doit acheter comme l’Iphone ou le dernier livre à la mode, avec le gouvernement
si démocratique que nous avons cela ne devrait pas poser de problèmes.
Je vois l’affaire comme ça : le 1er de chaque mois serait publié dans le Journal Officiel un objet ou un livre que l’on serait dans l’obligation d’acquérir, par exemple, au hasard, les mémoires de Johnny Halliday ou de Christian Clavier. Le hic pour l’achat obligatoire légal et mensuel d’un objet manufacturé ce serait d’en trouver un fabriqué en France, là on touche à l’invraisemblable, c’est triste à dire mais la seule fabrication qui fonctionne encore à plein chez nous c’est celle des chômeurs en fin de droit…
* Retrouver Arlette Shleifer dans Trace, Figure, Passage , Michel Moretti dans Mal Chronique, Elèna Piacentini dans Elénarration, Thierry Venturini dans L'effet Venturini et Denis Blémont-Cerli dans Homo machinus sempre emmerdae
"« Ils étaient tous dans le bar. Ils étaient tous armés. Ils étaient tous bourrés… [...] Ils laissèrent tomber les cartons. Ils visèrent et firent feu. Ils vidèrent leurs armes… »
On dirait une nouvelle en trois lignes de Felix Féneon. Peut-être un peu long! Felix Féneon faisait mieux: "Le Dunkerquois Scheid a tiré trois fois sur sa femme. Comme il la manquait toujours, il visa sa belle-mère : le coup porta."
Rédigé par : Jean-Paul | 26 janvier 2010 à 15:31