La Cadillac des Montadori de Marie Ferranti
Le merveilleux monde de Nickey Maousse par Michel Moretti

Un soupçon de mauvaise foi par Eléna Piacentini

Chevre Il y a un jour ou deux, le journal télévisé de 20 heures (sur la deux, je précise mais y a-t-il encore une différence ?) ouvrait une brève parenthèse pour informer ses braves téléspectateurs (dont je faisais partie, bon je me suis assez battu la coulpe) que les auteurs d’une agression raciste à Ajaccio venait d’être interpellés. Je rassure tout le monde, il ne s’agit pas d’Elisabeth qui a rabattu son bob à un touriste tapageur et borné en lui priant d’épeler le mot intelligence avec sa tong dans la bouche.

Je me suis interrogée : Que voulait signifier cette brève ?

A.    La police remplit son office avec diligence et efficacité
B.    Les Corses sont racistes
C.    Ce padduc est bon puisque les Corses qui sont mauvais le rejettent

C’est que voyez-vous, je venais de potasser un excellent bouquin (pour la lucidité mais par pour le moral) écrit par l’américain Vance Packard et dont le titre est éloquent : « The hidden persuaders », ou « Les manipulateurs sont parmi nous » ou si vous préférez « Regardez donc par là pendant que je fais mes petites affaires ».
Alors pourquoi ce pincement de culpabilité devant ce détournement d’une réalité tronquée ?
Combien y a-t-il eu d’agressions racistes dans la journée ? Pour chacune d’entre elles, s’est-on préoccupé de connaître l’origine géographique de ou des agresseurs ? Pourquoi n’aurions nous pas le droit, en tant que communauté, de revendiquer nous aussi notre quota de bas-du-front, lestes-du-poing ? Et combien de Corses ont-ils été victimes d’une forme plus ou moins évoluée de racisme ? Ah ! Mais oui, il y a des niveaux dans le degré de perversité ! J’ai dû repasser mon permis de conduire à Rouen, parce qu’à la lecture de mon lieu de naissance, mon examinateur m’a fait remarquer en passant que sa sœur s’était fait plastiquer sa maison en Corse, avant de me recaler pour…manque d’anticipation. Ça, c’est le niveau zéro. Mais il y a plus subtil.
« Oui voilà, mettez-vous bien à côté de votre cochon sauvage. Non ! Ne souriez pas ! Prenez l’air méchant. C’est PARFAIT ! » «  Regardez-donc les photos des mes dernières vacances en Corse ! C’est si sauvaâaaage ! Bon d’accord, c’est pas lui que je choisirais pour une soirée à l’opéra, mais il est chou, non ? ».
Franchement, je ne sais toujours pas lequel choisir. Avec le niveau zéro, le coup de poing serait autorisé, mais on tomberait aussitôt dans la caricature du Corse violent et vindicatif. Avec l’évolué qui accommode le mythe « du bon sauvage » à la sauce du fantasme de Lady Chatterley, l’explication de texte s’impose. Mais là, on violerait un commandement fondamental d’Audiard « je ne parle pas aux cons, ça les instruit ».

Que faire ? Que dire ?

Je me souviens avec nostalgie du temps où ma grand-mère me disait «  le juif est là avec son camion ». Elle ne signifiait rien d’autre que sa joie de choisir une parure de draps, qu’elle remiserait avec soin dans une malle, avant de l’ouvrir pour faire plaisir à un être cher, en lui remettant la parure encore dans son emballage, assortie d’un conseil délivré sur un ton de conspiratrice « c’est pour les grandes occasions ».
Voilà, je suis corse… J’ai mille raisons de m’en réjouir et quelques unes d’en prendre ombrage. Mais quoi qu’il en soit, c’est ce qui sert à me définir dès lors que l’on retient les critères de naissance et de culture. Ceci dit, je n’autorise pas le premier imbécile venu à me servir son analyse psycho-socio-psychanalytique sur ma condition. D’autant que je n’ai pas encore démêlé le pourquoi du comment de la cause. Est-ce bien nécessaire d’ailleurs ?
Je suis mariée à un homme d’origine libanaise, irlandaise, tombé dans la cuisine et la culture méditerranéenne dès sa plus tendre enfance. Cela plaide en faveur de mon ouverture d’esprit et pourtant, il m’arrive de me laisser aller à des accès de « racisme anti-con ».
En consultant les divers travaux de recherche qui traitent de la manipulation de l’information, de l’utilisation de cette même information au service d’une société de loisirs et de consommation, je suis atterrée de ce hold-up des consciences dont nous sommes victimes (enfin, pas tous).
Maintenant, je me sens apaisée. J’ai peut-être fait preuve, dans ces quelques lignes, de mauvaise foi, d’une rhétorique douteuse, d’exagération… Mais je n’ai pas cherché à manipuler quiconque. Tout au plus me suis-je laissée manipuler par un salvateur sentiment d’emportement.

Retrouver Eléna Piacentini dans la rubrique Elénarration

 

Commentaires

Nul n'est parfait!

Prendre comme pseudo "Loule de marseille" lorsque l'on n'est pas marseillais, c'est de la provoc... Nul doute que l'auteur du commentaire n'est pas un Marseillais mais sans doute un raciste... Du moins se plaît-il à le faire croire!...

loule de lmarseille

il a bien parlé le monsieur avant. Moi qui ne suis pas un crétin j'affirme à qui veux bien l'entendre qu'il y a deux choses que je déteste le plus au monde :
1 : les racistes
2 : les étrangers, ceux qui ne sont pas nés dans mon village, voir dans ma rue.
et les parisiens, mais eux c'est pas pareil, c'est parce qu'ils sont de Paris. Donc forcément !

Nul n'est parfait !

Un raciste est un raciste!

A partir de cette lapalissade, je veux dire qu'il déteste tout ce qui lui est étranger. Un individu qui fait du racisme anti-corse est souvent le même que celui qui fait du racisme anti-maghrébin ou de l'antisémitisme. Il part en général du principe qu'il est lui même parfait dans une sorte de sentiment arien et reste à l'affut chez l'étranger de ce qui alimente les caricatures colportées et donc entretenues dans la mémoire collective.

Finalement les pires sont ceux qui affirment n'être pas racistes en ajoutant un "mais" suivi d'assertions qu'ils considèrent irréfutables. Ce sont souvent des êtres amoraux mais moralistes pour les autres.

Comme ailleurs, il existe des racistes en Corse mais ceux qui en font un trait de caractère des Corses sont racistes eux-mêmes,souvent sans le reconnaître voire même dans l'inconscience de ce racisme inavoué.

Il n'est pas rare, étant corse, de se voir agressé verbalement par des racistes qui s'ignorent dès qu'un attentat ou un fait divers survient en Corse. Ils sont heureux de trouver un Corse devant eux sur le Continent et peut-être prennent-ils un secret plaisir là où, se sentant plus en sécurité, leur agression leur apparait comme une attitude courageuse. C'est aussi une façon de vous dire que vous n'êtes pas des leurs, c'est-à-dire des gens socialement corrects.

Dans un petit village des Alpes de haute Provence, j'ai même entendu une dame d'une soixantaine d'années, décrire la Corse comme une île moyenâgeuse et sale avant de terminer en assurant qu'elle n'y retournerait plus malgré le souhait contraire de son mari. On n'était pas loin des "mauvaises odeurs", dérapage d'un ancien président de la République.

Le racisme mène le plus souvent au crétinisme le plus abject. Il n'épargne aucune communauté dans les deux sens.

Nul n'est parfait!... Si les gens étaient conscients de cela, peut-être les racistes seraient-ils moins nombreux?...

L'utilisation des commentaires est désactivée pour cette note.