Lettre ouverte aux quelques rescapés de 2012 par Denis Blémont Cerli
19 juin 2008
Il m’est venu
à l’esprit que peu d’entre nous seront dans une position confortable en 2012.
Tout d’abord, c’est une évidence, le pouvoir d’achat va baisser
considérablement. Il me semble que plus personne n’aura les moyens d’avoir un
ordinateur, en tout cas, c’est certain, à part quelques privilégiés, aucun
salarié moyen ne pourra payer un abonnement Internet mensuel quand le pétrole coûtera
29872 dollars le baril.
C’est pour
cette raison que j’écris cette rubrique aujourd’hui, c’est une forme d’adieu au
consumérisme d’un temps que nous aurons connu.
Dans ma
jeunesse, j’ai vécu des choses terribles, nous n’avions pas la télévision, ni
téléphone fixe, ni appareil photo à dix millions de pixels ( si si, on vivait
sans tout ça !). Il est vrai qu’après avoir passé la journée à couper quelques
quintaux de bois de chauffage et porté 168 jarres depuis la fontaine publique,
il restait peu de temps pour les loisirs. Nous mangions du pain rassis avec
quelques gouttes d’huile d’olive, au printemps quelques tomates et fruits volés
dans les champs nous permettaient de tenir avant la récolte des châtaignes,
notre nourriture principale. Pourtant, je garde de bons souvenirs de ces années
de misère, d’autant plus qu’un jour, le 11 mars 1963, nous avions trouvé une
boite de sardines pleine ! C’est mon plus beau souvenir d’enfance…
Après est arrivée
une prospérité inouïe, j’avais un short pour moi tout seul, je n’étais plus
obligé de le partager avec la fratrie. Plus tard, j’ai eu un vélo et aussi une
mobylette d’occasion ! Incroyable !
C’est là
pourtant que sont arrivés les emmerdements. Avant tout était simple et puis
tout a changé. Quand on se bat pour survivre à la misère, on ne pense à rien,
on s’active, on dort comme un loir. Mais tout cela a été balayé par les trente
glorieuses, le bonheur s’en était allé, il nous avait fuis.
De nos jours
pour survivre dans la jungle technologique, il faut le QI d’Einsten, pas moins.
Regardez une notice d’emploi au hasard, le but du rédacteur est évident, il
essaye de vous rendre impossible
l’utilisation de l’engin en question. Pour lui, il y a deux avantages à vous
rendre dingue, primo vous allez balancer le truc par la fenêtre et en racheter
un autre illico puisque la marque en question à su vous rendre indispensable le
machin par la publicité. Secundo, vous avez toutes les chances de prendre un
rendez-vous chez le psy où il vous fourguera quelques cachetons à 50€ la
plaquette. C’est bon pour les affaires et l’expansion. Sans compter le crédit à
la banque afin de pouvoir régler des séances coûtant la moitié du PNB annuel du
Costa Rica et puis si vous avez pris un psy éloigné de chez vous comme on vous
l’a conseillé, (ça la fout mal de consulter un type qui habite à côté de chez
vous pour une notice d’emploi impénétrable…), vous serez dans l’obligation
d’acquérir un GPS et peut-être même de changer de voiture, la vôtre étant trop
inconfortable pour des trajets de plus de 200 kms.
Voyez donc où
nous mène le consumérisme matérialiste !
Voilà
pourquoi, je vous demande de ne pas sombrer dans un état comateux en voyant
notre société partir en quenouille.
Imaginez
votre vie sans toutes les saloperies qui nous encombrent !
Fini le temps
des enfants gâtés, des infantilismes du toujours plus, chaque fois qu’on achète
un nouveau gadget dernier cri, on se prive d’un appareil plus ancien qui ne
coûtait rien et fonctionnait parfaitement.
A l’avenir plus
de problèmes, une vie tranquille à cultiver son jardin comme Zadig, pas
d’abonnements à payer, plus de pub, plus de toutims à réparer, plus de notices
absconses, plus de numéros surtaxés de la hotline, plus de mise à jour Windows
qui plante. Juste du temps en plus, du temps à parler aux gens autour de soi, à
consacrer à ses enfants, de veillées entre voisins au coin du feu en se
racontant les légendes du terroir, le pied quoi, un truc qu’on ne pouvait
espérer sans la victoire de Nicolas à la dernière élection. Il voulait faire
notre bonheur et il a parfaitement réussi, il l’avait dit « je serai le
président du pouvoir d’achat » sans autre précision.
Nous n’avions
rien compris, c’était dans un sens antithétique qu’il fallait saisir son
propos. En 2012, nous le remercierons tous des bienfaits qu’il nous aura
procurés.…
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