Desserte maritime: ça tangue pas, ça balance !
Paris entre Québec, Mamoudzou et Ruda Slaska

The Ida Renerel's case (Livraison 1- Saison 1)

Tventurinidr Sur une plage du Cap corse, Ida Renerel a passé son dernier appel téléphonique, à la gendarmerie, avant de disparaître, laissant derrière elle deux photographies dissimulées dans la cabine téléphonique.

Livre199_tventurinidrLes ombres ont évolué et les photographies sont donc prises à des heures différentes de la journée. Les angles de prises de vue ne sont pas tout à fait identiques. Sur la photographie en couleurs, l’adjudant de gendarmerie Sextius Denticoni remarque une canne à pêche plantée dans le sable. Cette arme contre les poissons a disparu sur la photographie plus sombre. Quel temps s’est écoulé entre les deux clichés ? Une journée ? Une nuit ? Plusieurs jours ?

Quel péché ( peccatum )a commis un pêcheur (pescator) sur cette plage habituellement tranquille en ce mois de mars 2007 ? Miss Ida Renerel a-t-elle été prise au hameçon d’un pécheur (peccator) devant l’éternel ressac des vagues menaçant le rivage corse? Ou alors, est-elle la pécheresse ou une sirène qui a emporté gravement le pêcheur (pescator) au fond de la mer parfois tranquille, parfois rageuse et toujours mystérieuse… L’expectative dans laquelle il se trouve rend Denticoni d’une humeur péccante. Notre pandore corse avait pris l’appel de cette aventurière parlant le français avec un fort accent américain. Elle avait décliné son identité qu’il avait mentionnée dans le registre des appels avant d’y enregistrer sa déclaration téléphonique…

Mais est-on bien certain que ces photos aient été laissées par Ida Renerel ? A moins que cette dernière ne l'ait spécifié lors de son coup de fil à la gendarmerie ?

On ne saurait exclure qu'elle ait été enlevée et que ces deux clichés aient été placés là par son ravisseur. Une sorte de défi aux enquêteurs…

On ne peut pas exclure, non plus que ces clichés n'aient aucun lien avec Ida Renerel.

Que disait-elle, au juste, durant cet appel reçu par l'adjudant Denticoni ? Semblait-elle inquiète, voire affolée ?

Combien d'appels ont été passés ce même jour de la disparition d'Ida Renerel, depuis cette cabine sur la plage ? A qui ? Se pourrait-il qu'Ugo Pandolfi, par exemple, dont on sait l'admiration que lui voue Ida Renerel, soit au nombre des personnes contactées depuis cette cabine ? Peut-être, mais il l'ignore encore, n'ayant pas eu le temps de rentrer chez lui, qu'un message d'Ida l'attend, sur son répondeur. Un message qui pourrait éclairer la lanterne de Sextius…

L'adjudant Denticoni a-t-il bien inventorié le contenu de la poubelle située juste à côté de la cabine ?

A-t-il été possible, aussi, de déterminer depuis quand Ida se trouvait en Corse, par quels moyens s'y était-elle rendue, et si elle était descendue dans quelque hôtel proche de cette plage ?

C'est cela qu'il faudrait savoir…

Les bottes que l'adjudant Denticoni voulut prêter au substitut Camesson étaient trop petites. Malgré sa petite taille, le magistrat chaussait du 44. L' affaire s'annonçait mal. Après tout il n'y avait pas de cadavre à voir sur cette plage. Des traces de sang tout au plus, avait dit le gendarme. Deux photos et l'appel d'une étrangère à partir d'une cabine téléphonique que France Télécom avait eu l'idée saugrenue de poser sur la laisse de la mer comme on abandonne un chien avant de partir en vacances. Décidément Camesson n'avait pas de chance. Les deux dernières semaines qu'il venait de passer étaient maudites. La première gagnait le pompon au calendrier des cauchemars: Madame Camesson ne supportait plus rien, ni la Corse, ni les insomnies de son substitut de mari, ni les infidélités de son amant. Lundi, elle avait clairement signifié son intention de divorcer et de retrouver son Ile de France natale. Le lendemain, le 6 mars, Jean Baudrillard était mort. Le mercredi et le jeudi, Etienne Camesson avait tenté en vain de retrouver les deux premiers volumes des Cool Memories dans lesquelles il avait une envie folle de se replonger. Il ne les découvrit que vendredi dans les cartons abandonnés dans le fond du garage où les surmulots avaient fait leurs nids. Samedi, sa fille fêtait son quatorzième anniversaire avec une quinzaine de copines en folie. Camesson s'était réfugié au Palais de Justice. Il avait ensuite passé son dimanche à faire disparaître de son champ visuel les emballages de Carambar et les boites poisseuses de Coca Light. Les jours qui suivirent n'avaient rien apaisé. A présent, il était calme, serein presque, simplement parce qu'il était de permanence ce dimanche, et qu'il marchait sur la plage avec l'adjudant Sextius Denticoni. Le magistrat n'avait jamais été déçu par les gendarmes qui font du zèle. Et Denticoni, question zèle, il avait les palmes, le masque et le tuba. Total zélé, le Sextius, une couronne de lauriers sous le képi. Son inventaire de la poubelle située juste à côté de la cabine téléphonique était d'une précision exemplaire. Pas vraiment ragoutants les détails. Mais suffisament inquiétants pour que le substitut Camesson commence à se torturer les méninges.

Mention de main courante :

Disons que, ce jour, nous avons reçu un appel téléphonique d’une personne se présentant comme étant la Dame Ida Renerel nous informant que l’éclipse lunaire de la nuit du 3 au 4 mars dernier était annonciatrice d’un drame qui était en train de se jouer sur une plage de la commune,d’où elle était entrain de nous appeler. Elle a raccroché, sans nous laisser le temps d’essayer d’en savoir plus. D’heureux chef, nous transportons sur place.

L’Adjudant Sextius Denticoni.

Procès verbal de découvertes, saisies et placements sous scellés :

Nous, Sextius Denticoni

Adjudant-chef, Officier de Police Judiciaire

Poursuivant nos constatations,

Sans désemparer,

Disons procéder à l’inventaire et à la mise sous scellés des objets et documents découverts dans la poubelle de la cabine téléphonique située sur la plage de notre commune, comme suit :

Scellé n° UN : Un exemplaire de la nouvelle policière " A case of identity " écrite par Sir Arthur Conan Doyle, contenant un marque page des Editions Little Big Man et deux photographies de la plage avec la cabine téléphonique.

Scellé N° DEUX : Un boite vide de cigares de marque Ninas contenant un cafard mort.

Scellé N° TROIS : un billet d’invitation à une répétition de la pièce de Shakespeare "la Tempête ", par une troupe de comédiens corses amateurs.

Scellé N° QUATRE : Une chaussette multicolore genre Burlington supportant des traces noirâtres.

Scellé n° CINQ : Dans un petit vase de Soissons, un petit poinçon rouge.

Scellé N° SIX : Une boite de conserve ronde non ouverte avec les indications "merda d’artista ", "artist’s shit ", 30 grammes, Piero Manzoni.

Scellé N°SEPT : Un rouleau de papier hygiénique sur lequel est imprimé un article signé par Marcel Duchamp.

Scellé N° HUIT : Une page du catalogue de La Redoute consacrée aux articles de pêche, sur laquelle une main a écrit : " Le chemin , c’est moi, parce que je suis la vérité et la vie. Personne ne va au père sans passer par moi. - Jean 14 :6. ".

Scellé n° NEUF : Une pierre enveloppée dans une feuille de papier sur laquelle est écrit : " Tamo ! Samo ! ".

Disons que des recherches de traces papillaires et biologiques ont été effectuées sur les lieux et sur les différents objets et documents saisis. Les relevés effectués feront l’objet d’analyses au laboratoire de police scientifique.

Disons que des clichés photographiques ont été pris et seront annexés.

Disons que nous ferons appel à un interprète en langue anglaise pour traduire les termes : " A case of identity " et " artist’shit".

Disons que, avisé par nos soins, Mr CAMESSON, substitut de permanence, nous a rejoint sur les lieux.

L’officier de police judiciaire

De son côté, Sextius observait à la dérobée Camesson, avec la perplexité du pêcheur à la ligne qui vient de remonter une espèce non répertoriée. Drôle de petit bonhomme, avec ses panards comme des chaloupes de débarquement, son costume qui sortait indubitablement du bon faiseur mais semblait avoir séjourné longuement dans un panier de linge sale avant d'en être extrait en toute hâte sans passer par la case "teinturier", sa cravate -Denticoni misa pour de la soie- nouée à la diable, ses cernes prononcés et ce début de calvitie que, soit par négligence, soit par suprême crânerie, il ne cherchait pas à dissimuler. Pas brillant-brillant, mais Sextius avait appris, depuis fort longtemps, à ne pas s'arrêter à la prime apparence de ses semblables. Pas plus qu'à se fier aux "on-dit". Camesson passait pour un type compétent, bosseur. Pas le genre de magistrat à se faire muter en Corse pour s'y croiser les bras en méditant sur les discours qu'il tiendrait plus tard, à Lille, Aix ou Paris, sur l'impossibilité qu'il y avait sur ce fichu caillou à faire suivre à la justice le cours normal et serein qui était le sien partout ailleurs. Sans négliger l'incontournable tirade sur l'omerta, et quelques vacheries tout en demi-teintes sur le manque de zèle dont font preuve policiers et gendarmes, singulièrement lorsqu'ils se trouvent être du cru… Camesson semblait être d'une toute autre trempe. "Un pur" avait même entendu dire Sextius un jour à son propos. Mais il se méfiait des réputations, bonnes ou mauvaises, préférant ne s'en remettre qu'à sa propre expérience. Or si monsieur le substitut paraissait s'être échappé en toute hâte d'un camion-benne de la voirie ou -allez savoir ?- s'être arraché avec plus ou moins de regret aux griffes laquées de quelque cabouleuse de Bastia, Denticoni nota que malgré les cernes et les conjonctives de la couleur d'un bigarreau à l'eau-de-vie, le regard d'Etienne Camesson était tout sauf éteint. Las, mais pas blasé, l'homme.

Sans la moindre considération pour ses chaussures italiennes, le magistrat s'en vint rejoindre le gendarme qui arpentait à présent le rivage détrempé.

"Je ne suis pas certain que ce doigt coupé soit celui de la femme" dit-il.

A part lui, Sextius se fit la réflexion que Camesson avait employé la même formule que lui : depuis qu'il avait pris son appel, qu'il avait entendu sa voix, chaude, légèrement rauque, râpeuse comme un vieux velours précieux, il ne pensait pas à la disparue comme à "la dénommée Ida Renerel", ni comme à la "victime présumée".

Pour lui, elle était tout simplement "la femme"…

...à se torturer les méninges car le fond de la poubelle réservait manifestement une bien curieuse surprise. Parmi les détritus, qu'un grouillement de vers de vase mêlés de sciure semblait se faire mouvoir, Denticoni avait relevé quelques indices intrigants. Une boîte d'appâts, tout d'abord. A peine entamée, pour peu que l'on puisse se fier à la quantité de lombrics qui infestaient la poubelle. Or, son emballage était maculé de sang. Mais ce n'est pas tout : au milieu de ces immondices, Denticoni avait exhumé trois étuis de munitions. D'un genre peu commun, vu la rareté de l'alliage utilisé. L'adjudant pensait à des douilles de balles explosives...

 

Mail à l'attention de l'Adjudant Denticoni:

Comment faire une action offensive?

http://pute2life.free.fr/public/tutorial.php

Cliquez sur "Boite", puis choisissez un cafard. En validant, vous aurez accès à toutes vos actions offensives disponibles

Rédigé par: Blatte man | le 14 mars 2007 à 10:03

 

Mail à l’attention du Substitut Camesson

C’est une P’tit Jazzman Noir

Un type bizarre

Qui boit sa bière au comptoir

En fumant son cigare.

C’est un p’tit Jazzman Noir

Au piano bar

Je l'ai rencontré un soir

Le prédateur de cafard.

http://poesie.webnet.fr/vospoemes/3356/22681.html

Gisèle d’hôpital psychiatrique, sa Carmen à cigare, sa Belle au bois dormant junkie …

http://www.lyonweb.net/agenda/e/864/Ballet-de-l-Opera-de-Lyon-Solo-for-two-1996-Fluke-2002-.htm

… Qui m’emmène vers nulle part

Et qui me ramène

Dos à dos avec mon cafard

Qui broie du noir

Dans tous les bars

En réalité je me marre

Car la vie c’est un cadeau

A quoi bon broyer du noir ?

Il vaut mieux fumer un bon cigare…

www.algerie-dz.com/forums/archive/index.php/t-106.html

 

Denticoni lisait et relisait le message signé Blatte man , lorsque le téléphone coupa le silence dans lequel somnolait la gendarmerie à l’heure de l’apéritif. C’était le substitut Camesson, destinataire d’un autre message signé le cancre las.

Le scellé N°2 prenait de l’ importance dans une enquête au point mort, ce qui faisait cafarder l’adjudant. Avec les deux messages et les indices, il se disait qu’il aurait bien besoin d’un profiler capable de lui fournir sur l’identité du coupable plus de renseignements que l’ADN… Mais coupable de quoi ? Cette question le soulagea .

Pour l’heure, il n’avait aucun cadavre sur la commune et , si un meurtre avait été commis sur la plage, ce serait peut-être une autre gendarmerie qui hériterait du cadavre jetée à la mer, d’autant plus qu’une tempête avait sévi causant même des dégâts à une des paillotes pas encore brûlée sur ordre d’un préfet.

Faute de spécialiste du profilage, il irait se jeter derrière le gosier un coup de blanc de Roglianu, en compagnie du Babbu du Village, ce patriarche dont la sagesse et la mémoire seraient des atouts précieux. En outre, le grand-père avait des dons de mazzeru qui se révélaient le plus souvent après quelques canistrelli trempés dans du vin blanc, lorsqu'on lui offrait de fumer un cigare. Il devenait volubile avec des volutes fumeuses qui éclairaient le réduit de son cerveau en même temps qu'elles opacifiaient sa vision des choses. Comme dans cette étrange photographie prise sous un ciel zinzolin.

Soudain, l'adjudant eut une illumination. La vue d'un chat noir, liée à l'action du blanc, réveilla en lui sa curieuse prédisposition au mazzérisme. Et là, un providentiel don de prophétie funèbre lui laissa entrevoir le visage de la victime. Celui d'une femme. Jeune. Brune. Fluette. Mais très vite, cette vision évanescente, semblable à une volute, se dissipa sous l’effet d’un cri de terreur, celui de " ma biche ".

Notre adjudant dégaina son arme et monta à quatre jambes les deux marches qui le séparaient de son épouse localisée dans la cuisine en train de préparer des "bastelle", sortes de chaussons de pâte à pain fourrés avec des blettes, du brocciu… et des olives noires.

Celle-ci s’était d’abord étonnée qu’une des olives aient des pattes qui lui permettent de venir toute seule se faire dénoyauter , suivie par une seconde, une troisième… celle de trop qui déclencha l’alarme et les cris de " ma biche ", donc Joséphine car tel était le prénom de la "femme d’adjudant"…

Nous disons bien la femme d’adjudant , et non pas " de l’adjudant " , car il s’agit d’un titre plus que d’une fonction matrimoniale. Oui ! En épousant un gendarme, on s’engage dans la gendarmerie.

Le " mari de femme d’adjudant ", essoufflé par l’effort produit pour sortir son arme et monter deux marches, trouva sa " collaboratrice conjugale " prête à enjamber la fenêtre. Il crut à un attentat commis par des agresseurs cagoulés. Devant leur nombre et leur taille, il réalisa qu’il s’agissait d’une armée de cafards et choisit l’arme chimique pour exterminer les intrus qui portaient atteinte à l’intégrité de son territoire familial. La réalité aurait du le faire rire mais elle le ramenait à l’énigme du doigt coupé, au cafard mort dans la boite de cigares, aux deux messages de Blatte man et du Cancre las…

L’invasion de cafards dans son appartement de fonction ne pouvait être fortuite. Cette pensée l’angoissa jusque pendant son sommeil rempli de cauchemars dans lesquels il voyait des cafards fumant des cigares qui se transformaient en balles explosives, pendant qu’un doigt coupé le désignait comme la cible à atteindre…

La première fois que Sextius vit Joséphine, il la trouva franchement belle. . Elle lui plut, enfin.

- Stop ! fit le lecteur. Y en a marre. Vous n'allez tout de même pas vous prendre pour Aragon et nous récrire Aurélien. Non, mais...

Il aima comment elle était habillée...tenta à nouveau l'adjudant Ticoni qui voulait participer à l'écriture d'un roman en ligne qu'une bande de farfelus avait lancé dans le cyberespace.

-Basta, je te dis ! Ta disparue de la plaine orientale, c'est pas l'inconnue de la Seine, d'accord ? Faites nous un polar normal...Je sais pas moi, un truc simple, avec des cadavres, des tueurs, des témoins, des mobiles, des vrais flics, une enquête. Comme à la télé quoi...

- Ecoute petit, tu nous les brises avec tes clichés. On écrit ce qu'on veut, où on veut et quand on veut, intervint Camesson. Le substitut se tenait assis, dans un coin de la pièce, en tentant de se débarrasser de bottes qui étaient trop petites pour lui.

- Qui t'es toi, bouffon ? fis le lecteur, surpris.

Camesson l'ignora. L'adjudant Ticoni sourit, se leva lentement de sa chaise et se dirigea lentement vers le lecteur.

Il se pencha vers lui et murmura quelques mots à son oreille.

- Je savais pas, m'sieur. Excusez moi. Je pouvez pas savoir...

-Petit con, nique ta mère ! répondit simplement le magistrat.

- M'injuriez pas, m'sieur le substitut. Je vous ai présenté mes excuses. Il me semble que...

- Comment y me parle, lui ! répondit Camesson. Et où t'as appris à parler sur ce ton ?

-C'est au collège, m'sieur. On fait des leçons de mots, chaque semaine. C'est obligatoire. On doit employer des mots nouveaux chaque fois. C'est pas ma faute, c'est obligatoire...Je vous jure.

L'adjudant Ticoni fixa le substitut. Celui-ci regarda à son tour le gendarme. Les deux hommes étaient dubitatifs. Ils se tournèrent ensemble vers le jeune homme.

-D'accord, on veut bien te croire, fit le substitut Camesson. Tu va nous raconter une petite histoire avec le mot...

Camesson hésita, interrogea du regard l'adjudant. Il cherchait un mot difficile. Ticoni restait muet. Camesson se décida enfin.

-Une histoire avec le mot...hameçon.

Le jeune lecteur leva les yeux, regarda tout autour de lui, réfléchit un long moment avant de se lever pour narrer son histoire.

-La semaine dernière, mon père a fait une grosse colère. Il voulait s'acheter des bottes pour aller à la pêche. Il a fait plusieurs magasins, mais il n'a rien trouvé. En rentrant il était furieux. Il criait après ma mère qui ne comprenait rien à son histoire de bottes. C'est qu'hameçon toutes trop petites lui a t il expliqué.

- Je la connaissais, fit le gendarme, hilare. C'est l'histoire de Johnny, a queu hameçon trop petites. C'est Johnny, à queu’oui...

-Je vous en prie adjudant, fit sèchement le magistrat. Elle n'est pas drôle. Et, je vous signale tout de même que c'est pas gagner, votre cyber enquête à la con avec cette histoire de cafard dans la boite et vos délires magico-ethniques. Je veux un dossier béton, moi. Vous entendez ? Béton !

Un long silence s'installa dans la pièce enfumée.

- Béton, c'est pas possible, monsieur le substitut. Pas dans l'immédiat, fit le gendarme, timidement.

- Et pour quelles raisons, s'il vous plaît ?

-Les ententes illicites, monsieur le substitut. Vous avez pas lu les journaux. Les cimentiers, ils viennent de se faire allumer par le Conseil de la Concurrence. Personne ne parlera.

-L'omertà, en Corse, c'est la bonne excuse des mauvais flics, répondit Camesson. C'est pas moi qui le dit. C'est l'ancien patron du SRPJ d'Ajaccio qui l'affirme. Et croyez moi, il sait de quoi il parle. On va les trouver vos témoins. Et ils vont parler. Ils vont être encore plus bavards que les touristes de Guantanamo.

-Vous voulez dire que l'enquête va reprendre comme dans un vrai polar ? interrogea le lecteur, audacieux.

 © Cepa Miveco et Mico Vepace - Corsicapolar - Mars 2007 (Version 1.1 chronologique  et intégralement correcte à ce jour) La livraison est assurée chaque fois que de besoin afin de faciliter la lecture des commentaires plus ou moins délirants qui traduisent le caractère fantasque de leur auteur. La fidélité des livraisons par rapport aux originaux mis en ligne en temps réel est scrupuleusement contrôlée. Toutes réclamations concernant ces livraisons doivent être adressées au secrétariat de la rédaction du blog Corsicapolar. Celui-ci n'assure cependant aucun SAV, ni dépannage en cas  d'incompréhension ou de confusion du lecteur. Les scripteurs de la saison 1 tiennent à remercier tous ceux qui ont eu le courage et la patience de les lire jusqu'ici.

Commentaires

Ceccaldi

Lorsqu’il lisait la presse, notre adjudant Denticoni voyait des doigts coupés partout.
En Californie, une femme affirme avoir découvert un morceau de doigt dans son sandwich et en Ecosse, un chef cuisinier s’était coupé un doigt en ouvrant un avocat. Au bureau, ce crétin de gendarme Olivieri n’arrêtait pas de chanter …

Oh oh oh jolie poupée
sur mon doigt coupé
oh oh oh jolie poupée
tu me fais chanter

Y'a des marteaux du stylo intellectuels
moi j'ai du style au marteau j'suis un manuel
j'tap' sur un clou j'me tap' sur les doigts
j'coup' un bout d'bois j'me coup' un bout d'doigt
heureus'ment j'ai tout prévu en pareil cas
sous la main j'ai du coton sparadrap

Oh oh oh jolie poupée
sur mon doigt coupé
oh oh oh jolie poupée
tu me fais chanter
oh oh oh jolie poupée
sur mon doigt coupé
oh oh oh jolie poupée
bobo pas pleurer…

Et si ce doigt n’était que le premier d’une série ? Aucune revendication n’était parvenue officiellement. Les deux messages anonymes pouvaient être des plaisanteries de mauvais goût ou l’œuvre d’un fou. La thèse de l’enlèvement n’était pas idiote car aucun corps n’avait été retrouvé….

Notre enquêteur avait enlevé son képi pour donner plus d’espace à son crâne dans lequel les idées se trouvaient à l’étroit, lorsque le curé du village entra dans la gendarmerie.
Le saint homme venait voir l’adjudant pour lui faire part de la peur collective de ses ouailles. L’affaire du doigt coupé alimentait toutes les conversations. Les rumeurs allaient bon train et nos villageois voyaient derrière tout cela la main du malin.

Alors que Denticoni s’évertuait à rassurer notre curé qui ne pratiquait pas l’exorcisme, ce dernier sortit un livre de sa poche et lui fit la lecture du martyre de Saint Jacques l’Intercis : un extrait de La légende dorée de Jacques De Voragine, œuvre traduite par l’Abbé J-B M. RozeL'ABBÉ, Chanoine Honoraire de la cathédrale d'Amiens, aux éditions Edouard Rouveyre.

« … Alors, les bourreaux lui coupèrent le pouce de là main droite; et Jacques s'écria : « Jésus de Nazareth, mon libérateur, recevez ce rameau de l’arbre de votre miséricorde; car, celui qui cultive la vigne en coupe le sarment, afin qu'elle pousse de plus beaux jets et qu'elle produise avec plus d'abondance. » Le bourreau lui dit : «Si tu veux obéir, je puis encore t'épargner, et je te donnerai des médicaments. » Jacques répondit: « N'as-tu pas vu un cep de vigne? Quand on coupe les sarments, le noeud qui reste produit de nouvelles branches, à chaque taille, quand le temps est venu et que la terre commence à s'échauffer; si donc on taille la vigne à différentes époques, pour qu'elle produise des jets, à combien plus forte raison le chrétien fidèle en donnera-t-il, lui qui est enté sur la véritable vigne qui est le Christ? » Alors, le bourreau vint lui couper le second doigt. Et le bienheureux. Jacques dit : « Recevez, Seigneur; ces deux rameaux qu'a plantés votre droite. » Il coupa encore le troisième, et saint Jacques dit : « Délivré d'une triple tentation, je bénirai le Père, le Fils et le Saint-Esprit, et avec les trois enfants préservés dans la fournaise, je vous confesserai, Seigneur, et en union avec le choeur des martyrs, je chanterai des cantiques à votre nom, ô Jésus-Christ ! » Le quatrième doigt fut coupé aussi, et Jacques dit: « Protecteur des enfants d'Israël, qui avez béni jusqu'à la quatrième génération, recevez de votre serviteur le témoignage de ce quatrième doigt, comme ayant été béni en Juda. » Quand le cinquième doigt fut coupé, il dit : « Ma joie est, complète. » Alors, les bourreaux lui dirent : « Epargne maintenant ta vie ne meurs as, ni ne te contriste point d'avoir perdu une main ; car il y en a beaucoup qui n'en ont plus qu'une, et qui possèdent beaucoup de richesses et d'honneurs. » Le bienheureux Jacques répondit : « Quand les bergers se mettent à tondre leurs troupeaux, enlèvent-ils seulement la toison de droite, et laissent-ils celle qui est à gauche? Et moi qui suis un homme raisonnable, dois-je moins dédaigner d'être tué pour Dieu ? » Alors ces impies s'approchèrent et coupèrent le petit doigt de la main gauche, et Jacques dit : « Vous, Seigneur, vous étiez grand, et vous avez voulu vous faire tout petit et chétif pour nous; c'est pour cela. que je vous rends le corps et. l’âme, que vous avez créés et rachetés de votre propre sang. » On coupe ensuite le septième doigt, et il dit : « Sept fois le jour, j'ai célébré les louanges du Seigneur. » On coupe le huitième, et il dit : « Le huitième jour, fut circoncis Jésus, et le huitième jour, on circoncit l’hébreu, afin de l’admettre aux cérémonies légales; faites donc, Seigneur, que l’esprit de votre serviteur se sépare de ces incirconcis qui conservent leur souillure, afin que je vienne à vous et que je voie votre face, Seigneur. » On coupe ensuite le neuvième doigt, et il dit : « A la neuvième heure, le Christ rendit l’esprit sur la croix; ce qui me fait confesser votre nom et vous rendre grâces par la douleur de ce neuvième doigt. » On coupe le dixième; et il dit : Le nombre dix est celui des commandements... Alors, quelques-uns de ceux qui étaient là lui dirent : « O vous, qui avez été autrefois notre ami intime, faites votre déclaration seulement devant le consul, et vous vivrez ; car, quoique vos mains soient coupées, il y a cependant de très habiles médecins qui pourront guérir vos douleurs. » Jacques leur dit : « Loin de moi une si infâme dissimulation ! car quiconque, ayant mis sa main à la charrue, regarde derrière soi, n'est point propre au royaume de Dieu. ». Alors, les bourreaux indignés s'approchèrent et lui coupèrent le pouce, du pied droit, et Jacques dit : « Le pied du Christ a été percé, et il en est sorti du sang. » On coupe le second doigt du pied, et il dit: « Ce jour est grand pour moi, en comparaison de tous les autres de ma vie ; car aujourd'hui, j'irai vers le Dieu fort. » Ils coupèrent aussi le troisième, qu'ils jetèrent devant lui ; alors. Jacques dit en souriant : « Va, troisième doigt, rejoindre tes compagnons,; et de même qu'un grain de froment rapporte beaucoup de fruits, de même aussi, au dernier jour, tu reposeras avec tes compagnons. » On coupe le quatrième, et il dit : «Pourquoi es-tu triste, ô mon âme, et pourquoi te troubles-tu ? Espère en Dieu, car je lui rendrai encore des actions de grâce; il est mon Sauveur et mon Dieu.» On coupe le cinquième, et il dit « Je puis dire maintenant au Seigneur qu'il m’a rendu digne d'être associé à ses serviteurs. » Alors ils prirent le pied gauche, et en coupèrent le petit doigt, et Jacques dit : « Petit doigt, console-toi, car le petit et le grand ressusciteront également; si un petit cheveu de la tête ne périra pas, pourquoi serais-tu séparé de tes compagnons ? » On coupe le second, et Jacques dit : « Détruisez cette vieille maison, car on m’en prépare une plus belle. » On coupe le troisième, et, Jacques dit: « L'enclume s'endurcit sous les coups. » On coupe encore le quatrième, et il dit : « Fortifiez-moi, Dieu de vérité, parce que mon âme se fie en vous et que j'espérerai à l’ombre de vos ailés, jusqu'à ce que l’iniquité soit passée. » On coupe . aussi le cinquième, et il dit : « Voici, Seigneur, que je, m’immole pour vous vingt fois. » Alors ils lui prirent le pied droit et le coupèrent ; Jacques dit : « J'offre ce présent au roi du ciel, pour l’amour de qui j'endure ces tourments. » Ils coupèrent ensuite le pied gauche, et le bienheureux Jacques dit : « C'est vous, Seigneur, qui faites des merveilles ; exaucez-moi et me sauvez. » Ils coupèrent la main droite, et il dit : « Que vos miséricordes me viennent en aide, Seigneur! » A la gauche, il dit : « C'est vous, Seigneur, qui opérez des merveilles. » Ils coupèrent le bras droit, et il dit : « O mon âme, louez le Seigneur. Je louerai le Seigneur pendant ma vie; je célébrerai la gloire de mon Dieu, tant que je vivrai. » Après quoi, ils coupèrent le bras gauche, et il dit « Les douleurs de la mort m’ont. environné ; au nom du Seigneur, j'en serai vengé. » Alors ils s'approchèrent., et coupèrent la jambe droite en la sciant jusqu'aux reins. Le bienheureux Jacques, accablé par une douleur inexprimable, s'écria : « Seigneur Jésus-Christ, aidez-moi, car les gémissements de la mort m’ont environné. » Puis, il dit aux bourreaux : « Le Seigneur me recouvrira d'une nouvelle chair, que vos blessures ne sauront souiller.» Les bourreaux étaient épuisés, parce que, depuis la première heure du jour , jusqu'à la neuvième, ils avaient sué à le trancher. Enfin ils prirent sa jambe gauche, et la coupèrent jusqu'aux reins. Alors saint Jacques s'écria : « Souverain Seigneur, exaucez un homme à demi mort ; vous êtes le . maître des vivants et des morts. Des doigts, Seigneur, je n'en ai plus pour les lever à vous; des mains non plus, pour les étendre vers vous ; mes pieds sont coupés et rues genoux sont abattus, je ne puis plus les fléchir devant vous ; je suis comme une maison qui a perdu ses colonnes et qui va crouler. Exaucez-moi, Seigneur J.-C., et ôtez mon âme de prison. » Après ces mots, un des bourreaux s'approcha et lui coupa la tète… »

Denticoni était resté muet alors que l’angoisse l’envahissait à l’idée de recevoir un cadavre en kit. L'homme d'église lâcha, avant de retourner plus près de Dieu : « Il ne faut prendre cette histoire à la légère. Mon petit doigt me l’a dit… » Ainsi s'acheva la rencontre entre le sabre et le goupillon...

Pandolfi

Ida Renerel a bien été enlevée. Voir ce nouvel élément de l'enquête:
http://www.grapheine.com/classiktv/classiktv_play.php?id=51019

Ceccaldi

Le juge Etienne Camesson cachait derrière son deuxième prénom « Ferdinand » un secret de famille. C’était le prénom de son trisaïeul, né à Boubers sur Canche dans le Pas de Calais et décédé à la prison de Riom, , sans domicile fixe.

Au palais de justice, ses collègues surnommait le juge aux grands pieds « le clown » ou bien « Jameson » , une allusion à son goût affirmé pour la boisson gaélique aux reflets cuivrés et aux effets d’une bonne cuite. Ferdinand Camesson avait fait la plus grande partie de sa carrière dans des îles lointaines qui lui avaient donné le goût du « Kolé Séré" et des peaux noires. La biguine et ses béguins lui avaient valu des menaces de mort de la part de quelques maris jaloux. D’île en île, il s’était rapproché de la France pour se retrouver en Corse, où il avait trouvé charentaise à son pied puisque son épouse était native de Gardes-le-Pontaroux,.
« Quétou qu'olé ? » était la question que sa drôlesse lui posait de façon récurrente. Si ces mots de patois charentais lui rappelaient ses frasques antillaises, ils signifiaient en réalité « Qu’est-ce que c’est ? » car, en Corse, la Charentaise un peu sourde avait pris du sable dans les oreilles. Lorsque nous disons « à son pied », nous devrions dire à ses pieds, puisqu’il s’agissait de sa greffière devenue son épouse. Nous ne mettrons pas un pied de plus car le reste est du domaine de la vie privée.. et depuis lors, ils eurent une fille, un caniche et un matou corse.
Après le mariage, la justice était devenue une affaire familiale et notre juge faisait des rêves de grandeur. Il se voyait vêtu d’un habit bleu sur une robe rouge, coiffé de son bonnet rond sur lequel une balance était cousue de fil d’or. Parfois la plume de Maât venait et voletait au dessus des plateaux de la balance lorsqu’il siégeait au tribunal d’Osiris…
Sous sa toque de magistrat, Camesson avait pu développer son esprit cartésien, mais, en Corse, c’était sa part d’irrationnel qui prenait le dessus, la part qui rêve. Pour l’heure notre porteur de mortier était accaparé par l’affaire des cimentiers… Cette enquête ne semblait pas bâtie sur du sable et on avait pas semé dessus . L’action judiciaire engagée n’était pas inutile.
Bien sûr, les ententes illicites n’étaient pas des mystères et l’énigme posée par Ida Renerel est bien plus Holmesienne.
Il s’agit d’un doigt coupé, non d’un nez.Avec un nez, on aurait pu penser qu'Ida Renerel était devenue
une nazimozze, cette fée corse sans nez, ou bien qu’elle avait fourré son nez là où il ne fallait pas , comme ,par exemple, une affaire d’entente illicite…

Ceccaldi

Denticoni s’était retrouvé avec ce doigt coupé et des étuis de munitions qu'il avait rajoutés dans la procédure.

Coton-tige et mouchoir étaient ses deux accessoires indispensables pour garder l’ouïe fine et son flair d’enquêteur.
Pour la vue, il chaussait une paire de lunettes corrigeant sa myopie, seule excuse à présenter pour avoir négliger des indices importants.
Il disposait maintenant d’une empreinte digitale et d’un ADN dans un seul doigt. Il restait à découvrir quelle identité se cachait dans les méandres digitaux et les serpentins d’Acide désoxyribonucléique...

Maintenant, voilà qu' il faisait des cauchemars. Il y a des jours où il se disait qu’il laisserait bien béton, mais c'étaient des défaillances passagères. Il suffit de laisser un peu de sable du temps s’écouler, d’y jeter dessus un bon verre d’eau de vie pour cimenter les fêlures et refaire la façade de son opiniâtreté de gendarme. Il faudrait cependant fortifier les fondations de son enquête pour ensuite, pierre après pierre, construire la clôture autour du coupable pour la transformer en prison.

Mais quel coupable ? Quel crime?...

Heureusement, cette affaire insulaire, qui risquait de faire voler en éclat l’entente des cimentiers avec ses nouvelles éclaboussures médiatiques, occupait la magistrature et sa hiérarchie, tout en mettant du liant dans l’histoire. Personne ne lui avait encore mis la pression pour que l’enquête avançât plus vite, à part, peut-être, un lecteur de polar qui confondait fiction et réalité.

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